Une entreprise canadienne de construction de fondations profondes, qui a joué un rôle important dans les améliorations sismiques en cours du barrage John Hart sur l’île de Vancouver, à Campbell River, affirme que le travail d’équipe a contribué en plus grande partie à ses efforts de fortification de l’énorme structure afin de la rendre conforme aux normes modernes.
Bauer Foundations Canada, une filiale de la société allemande Bauer Spezialtiefbau, a participé à deux parties importantes du projet, qui devrait coûter entre 646 et 923 millions de dollars et être achevé d’ici 2030.
La première était l’amélioration du sol de la digue de terre au nord. Cette partie nécessitait entre autres la construction de bermes de terre en amont et en aval du barrage. Les équipes de Bauer ont dû utiliser une sonde cylindrique à entraînement électrique, pour installer des piliers d’agrégat, ou colonnes, dans la structure en terre afin de solidifier le sol et d’augmenter sa densité en prévention d’un tremblement de terre.
L’autre partie était l’ajout d’un mur parafouille en béton plastique à faible perméabilité à l’intérieur du barrage en terre intermédiaire, qui servira de nouvelle barrière d’étanchéité principale. Le mur parafouille en béton plastique coulé sur place est parallèle aux barrières d’étanchéité existantes du barrage (250 mètres) et s’étend du sommet du barrage jusqu’au socle rocheux ou à la couche inférieure de limon gris (jusqu’à 38,5 mètres). L’objectif de la nouvelle barrière d’étanchéité principale est d’améliorer la résistance sismique, de réduire l’infiltration à travers le mur écran en terre d’eaux souterraines provenant d’un réservoir adjacent et d’assurer la protection de la population de Campbell River, qui est située dans la plaine inondable du réservoir.
Une fois les travaux terminés, le barrage devrait pouvoir résister à un événement comme il ne s’en produit qu’une fois tous les 10 000 ans, tel qu’un tremblement de terre d’une magnitude de 9,0 ou plus.
Le barrage John Hart a été construit en 1947 sur l’île de Vancouver, l’une des zones sismiques les plus actives en Colombie-Britannique. Les travaux actuels font suite à une étude de 10 millions de dollars menée sur six ans visant à déterminer ce qui pourrait être fait pour préparer les barrages de la province à un événement sismique majeur. Jeff Pattison, chef de projet chez Bauer, explique que si son entreprise a participé à des projets similaires dans d’autres pays, c’était la première fois qu’elle entreprenait un projet de cette nature et de cette ampleur au Canada.
L’un des plus grands défis associés au projet a été de dénicher les techniciens spécialisés requis pour effectuer le travail. Bauer a fait venir des travailleurs expérimentés d’aussi loin que la France, l’Italie, les États-Unis, la Malaisie, l’Indonésie et son siège en Allemagne pour compléter et former son équipe déjà en place.
« Nous avons fait appel à des experts du monde entier, d’au moins une demi-douzaine de pays. Nous avons également fait venir et formé des travailleurs de six provinces du Canada. Ça a été tout un défi que nous avons très bien réussi à relever. Une expérience tout simplement formidable dans l’ensemble, a déclaré Jeff Pattison. Nous sommes extrêmement reconnaissants d’avoir pu nous appuyer sur leur expérience. En plus de nous donner confiance en nos capacités, l’expérience qu’ils ont apportée nous a permis de nous concentrer à fond sur le travail à accomplir. »
L’une des raisons pour lesquelles les travaux d’amélioration du sol du barrage en terre nord ont été si difficiles à réaliser est qu’ils se déroulaient dans des environnements marins et terrestres. De plus, comme il s’agit d’une zone écologiquement sensible, des pieux temporaires ont dû être enfoncés dans le sol pour construire un filtre à limon ancré au fond du réservoir. Le filtre a permis d’empêcher l’eau agitée près des bermes de s’écouler dans le réservoir ou la rivière et de causer des « effets néfastes sur l’environnement », a expliqué Jeff Pattison.
L’aspect possiblement le plus intéressant de la participation de Bauer au projet a été l’installation du mur parafouille en béton plastique à faible perméabilité dans le barrage de remblai intermédiaire. Imaginez une palplanche géante placée à l’intérieur de la barrière pour empêcher l’eau du réservoir voisin de s’infiltrer à travers le barrage.
« Nous avons fait appel à des experts du monde entier, d’au moins une demi-douzaine de pays. Nous avons également fait venir et formé des travailleurs de six provinces du Canada. Ça a été tout un défi que nous avons très bien réussi à relever. »
Jeff Pattison, Bauer Foundations Canada
La particularité du mur parafouille réside dans le fait qu’il a nécessité l’utilisation d’un type unique de béton plastique. Selon Jeff Pattison, le béton plastique est idéal pour ce type de travaux car sa faible perméabilité et sa faible résistance à la compression lui confèrent un haut niveau de ductilité, ou de flexibilité – ce qui est essentiel en cas d’événements sismiques.
Dans le cadre de ses préparatifs, Bauer a mené une série d’essais en laboratoire pour tester le béton plastique et s’assurer qu’il répondait aux exigences en matière de résistance, de perméabilité et de ductilité. L’entreprise a commencé à travailler sur les améliorations du sol et du mur parafouille simultanément en octobre 2023 et a terminé ses travaux en juillet dernier.
Si Bauer a effectué des travaux similaires dans nombre de pays, c’était la première fois qu’elle le faisait au Canada. L’entreprise a donc fait appel à sa division des services internationaux pour l’assister dans la planification préliminaire et les essais de mélange avec Aecon/EBC General Partnership, l’entrepreneur principal. Elle a notamment réalisé l’un des essais en laboratoire à son siège en Allemagne, en raison de leur expérience dans l’exécution de ce travail hautement spécialisé. À deux reprises, l’entreprise a également fait venir d’Allemagne un spécialiste en matériaux pour apporter une expertise de première main au projet.
L’installation du mur parafouille à l’intérieur du barrage a également présenté un défi logistique. À tout moment, jusqu’à 50 employés de Bauer travaillaient au sommet du barrage et des douzaines de pièces d’équipement se trouvaient sur place, ce qui signifie que tous ces éléments devaient être soigneusement coordonnés à tout moment.
« Nous avancions essentiellement dans une voie à sens unique pour coordonner la logistique, a déclaré Jeff Pattison en riant. Nous avons dû construire nos installations autour de ces obstacles. Nous avons dû déplacer notre équipement, le faire passer d’un côté à l’autre. La logistique nécessaire pour travailler dans un espace aussi restreint a été un véritable défi. Nous n’avions pas d’autre choix que de nous organiser avec ce que nous avions. Il nous est arrivé d’avoir à empiler des pièces d’équipements les unes sur les autres et nous aussi dû construire des espaces pour placer certaines pièces d’équipement pour permettre à d’autres de passer.»
Selon Jeff Pattison, les employés de Bauer méritent d’être reconnus pour avoir mené à bien leur mission dans le cadre du projet de barrage. Deux équipes travaillaient par roulement de douze heures chaque jour, ce qui signifie qu’une équipe était présente tout au long de la journée et qu’une deuxième équipe prenait la relève le soir. Les équipes et les superviseurs étaient en constante communication.
Bien que les températures hivernales ne soient jamais descendues sous la barre des 15°C pendant les travaux, Jeff Pattison explique que le temps plus frais a compliqué les choses. « Il ne fait jamais très froid à cet endroit – en tout cas pas autant que dans d’autres régions du pays – mais nous avons dû prendre toutes sortes de mesures pour garder au chaud certains des composants du béton, et l’équipement, sinon ça aurait gelé », a-t-il déclaré.
La zone à proximité du barrage étant très sensible sur le plan écologique, Bauer et les autres entreprises qui ont participé au projet ont pris un certain nombre de mesures pour s’assurer de minimiser leur impact sur l’environnement. Par exemple, des centaines de stations de surveillance active ont été installées à l’échelle du barrage pour contrôler les vibrations ou les tassements. On a aussi assuré en continu la collecte de données et la surveillance du niveau des eaux souterraines.
Jeff Pattison a expliqué que son entreprise a également dû faire preuve d’une grande diligence en ce qui concerne l’utilisation de la bentonite, une argile plastique très absorbante et visqueuse utilisée comme agent de liaison et d’étanchéité. La bentonite a un pH plus élevé que l’eau du réservoir, ce qui signifie qu’elle est plus acide et qu’elle pourrait poser un problème environnemental majeur si elle s’infiltrait dans l’eau du réservoir ou dans la rivière voisine.
La bentonite a été utilisée pour créer une boue afin d’aider à maintenir les tranchées ouvertes le long du mur parafouille. En conséquence, Bauer a dû faire preuve de diligence pour limiter la menace que le matériau représentait pour les travailleurs et s’assurer que seul l’équipement essentiel et les travailleurs formées s’approchaient de l’endroit où il était utilisé.